Parler de l’identité latine de la France ne devrait pas être un tabou
- Luc Delmont
- 16 juin
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 17 juin

q« Nous ne sommes pas de race latine, mais nous sommes d’esprit latin. »— Numa Denis Fustel de Coulanges*
*La pensée de Fustel de Coulanges a été, à certains moments, récupérée et détournée par certains courants de l’extrême droite. Son insistance sur les racines antiques et sur la continuité historique des institutions a été instrumentalisée pour servir des discours nationalistes, éloignés de l’approche méthodique et rigoureuse qu’il prônait. Cette récupération idéologique trahit la volonté originelle de Fustel de Coulanges, qui cherchait avant tout à comprendre les fondements historiques des sociétés à travers une analyse scientifique, et non à promouvoir une quelconque idéologie.
Depuis plusieurs années, les débats autour de l’identité française semblent prisonniers d’un piège : quiconque ose s’inquiéter de la déconstruction des repères collectifs ou critiquer les dérives de l’Union européenne est immédiatement suspecté de dérive droitière, voire qualifié de « réac », de « nostalgique » ou pire, de « facho ».Ce climat étouffant rend le débat public presque impossible, alors même que de nombreux citoyens, y compris de culture de gauche républicaine ou gaulliste sociale, aspirent à une réflexion sérieuse, sereine et enracinée sur ce que nous sommes — et ce que nous voulons rester.
Il est temps de redonner toute sa force à une idée trop oubliée : la France n’est pas une entité biologique ou ethnique, mais une nation d’esprit, héritière d’un grand cadre civilisationnel : la latinité.
Fustel de Coulanges : une autre voie pour penser la France
Numa Denis Fustel de Coulanges, historien du XIXe siècle, a laissé derrière lui une œuvre essentielle pour qui veut comprendre les fondements non ethniques de la nation française. Sa formule — « nous ne sommes pas de race latine, mais d’esprit latin » — nous rappelle que la France s’est construite non pas sur une origine raciale, mais sur une culture juridique, politique, linguistique et institutionnelle issue de Rome.
Ce n’est pas un hasard si la France a porté si haut l’idée républicaine, ni si elle a su marier le droit romain, la langue latine et l’idée de citoyenneté pour façonner un modèle politique universel. C’est cela, l’esprit latin : un attachement à la raison, à la loi, à la hiérarchie du bien commun, au civisme. Cet esprit nous traverse encore, malgré les crises de sens que nous vivons.
Quand l’universalisme devient suspect
Aujourd’hui, défendre cette idée d’une identité française fondée sur l’esprit commun et non sur les appartenances particulières est devenu presque suspect. Celui qui affirme que la France est une construction politique et historique, non une mosaïque communautaire, est vite accusé de nostalgie ou de crispation identitaire.
Mais il y a une différence fondamentale entre défendre une culture commune et refuser la diversité. Loin des caricatures, ce discours est au contraire inclusif, parce qu’il propose à chacun — quelle que soit son origine — de participer à une communauté de principes, de langue, de mémoire et d’institutions. C’est ce qu’on appelait autrefois… la République.
Une Union européenne qui oublie ses racines ?
L’Union européenne, dans sa version actuelle, semble elle aussi vouloir se défaire de toute mémoire historique structurante. Ce n’est plus l’Europe des peuples et des cultures héritées, mais celle du marché, des flux, de la déconstruction des souverainetés.Or, cette Europe-là oublie qu’elle repose, elle aussi, sur un socle latin : celui du droit romain, de la citoyenneté, de la subsidiarité, des langues romanes, des structures de la cité. En tentant de gommer les singularités nationales au profit d’un universalisme abstrait et hors-sol, elle ne fabrique pas de l’unité, mais de la défiance.
Nous avons besoin d’une Europe des latinités : une Europe consciente de ses racines, fière de sa culture civique, respectueuse des souverainetés populaires. Une Europe à visage humain, politique avant d’être technocratique.
Défendre une identité, ce n’est pas exclure, au contraire
Ce que nous proposons ici — et ce que partagent de plus en plus de Français silencieux —, ce n’est pas un retour en arrière ou un repli sur soi. C’est au contraire un acte de fidélité et de lucidité : fidélité à notre histoire, à notre modèle de nation politique et culturelle ; lucidité face aux impasses d’un universalisme sans incarnation.
Nous devrions pouvoir dire :
Oui, la France a une identité.
Oui, cette identité s’enracine dans la latinité, dans l’universalisme républicain, dans la laïcité.
Et non, cela n’a rien à voir avec une quelconque nostalgie fasciste ou excluante.
Ce discours n’est ni de droite, ni de gauche. Il est français, tout simplement. Et le fait même qu’il soit devenu difficile à exprimer sans être caricaturé prouve qu’il est aujourd’hui vital de le faire entendre.
Conclusion : remettre l’esprit latin au cœur du débat
Nous n’avons pas à rougir d’aimer la France, ni à nous excuser de vouloir préserver ce qu’elle est, ni à fuir les mots qui définissent notre culture.Redécouvrir l’esprit latin, c’est redonner sens à la République, à la langue, à la mémoire collective. C’est refuser le double piège de la race comme fondement et du relativisme sans limites.
Entre l’oubli de soi et la haine de l’autre, il y a un chemin exigeant, mais noble : celui de la transmission, de l’enracinement ouvert, de la continuité sans fermeture.
C’est ce chemin que France Europe Latine entend défendre.



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