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Et si l’Occitanie aidait la France a ce réconcilier avec elle-même ?

  • Luc Delmont
  • 9 oct.
  • 5 min de lecture
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Face à la crise de l’identité nationale et à la montée des fractures culturelles, les cultures régionales offrent un ancrage commun. L’Occitanie, forte de son histoire, de sa langue et de sa convivialité, de ses liens avec la méditerranée, avec l'Espagne et l'Italie, pourrait redevenir un modèle d’unité apaisée.



La France désunie cherche un centre de gravité


La France doute d’elle-même. Elle s’interroge sur son histoire, s’accuse, se divise, s’épuise à redéfinir ce qu’elle est.


La nation, autrefois fière de sa mission universelle, s’est transformée en champ de bataille idéologique. La gauche radicale y voit un récit oppressif, hérité du colonialisme. La droite, en miroir, s’y raccroche comme à un dernier refuge.


Entre ces deux pôles, une majorité silencieuse oscille entre nostalgie et lassitude, ne trouvant plus dans la République centralisée ce fil commun qui faisait jadis tenir ensemble des territoires si différents. Et pourtant, dans le silence des provinces, un autre récit subsiste. Loin des plateaux télévisés et des querelles d’universitaires urbains, les identités locales continuent de vivre. On les retrouve dans les accents, le marché, les fêtes de village, la chanson populaire. C’est là, dans cette culture du quotidien, que se conserve peut-être ce que la nation moderne a perdu : la capacité à unir sans contraindre, à appartenir sans exclure.


L’Occitanie, une identité qui parle à tous


Parmi ces racines silencieuses, l’Occitanie tient une place à part. Elle couvre un immense territoire, bien plus grand que la nouvelle région administrative du même nom : du Limousin à la Provence, du Béarn au Languedoc. Elle couvre 40% du territoire national.


Elle a sa langue, son histoire, son imaginaire. Mais surtout, elle possède une vertu rare : elle parle à tout le monde. À la droite, elle offre la continuité, la fidélité à la terre, le goût des traditions et du réel. À la gauche, elle rappelle le combat d’une culture dominée par la centralisation parisienne, la résistance tranquille d’un peuple que l’on n’a jamais complètement fait taire. Et pour les nouveaux arrivants, elle ouvre une porte : en Occitanie, “être d’ici” n’est pas une question d’origine génétique, mais d’attachement charnel. On le devient par le cœur, par la participation à la vie commune. Loin du folklore ou de la revendication identitaire, l’Occitanie propose un modèle de civilisation profondément latine, fondé sur la convivialité.


Réinventer le récit occitan


Pendant longtemps, la culture occitane a été reléguée au rang de curiosité pittoresque : une chanson à la guitare, un drapeau à croix, un accent de cinéma. Mais si elle veut jouer un rôle dans la France d’aujourd’hui, elle doit se réinventer.


Cette renaissance passe d’abord par la langue, qu’il faut oser remettre au centre de la vie publique : dans les écoles, les médias, la signalétique, les festivals. Elle passe aussi par la création contemporaine. Une culture ne survit que si elle produit du neuf à partir de son héritage historique. Mais la revitalisation ne saurait se limiter à la sphère artistique. Elle doit devenir un projet de société. L’Occitanie peut incarner une écologie enracinée, respectueuse de la terre et des paysages. Elle peut inspirer une économie locale fondée sur la solidarité, les circuits courts, le lien entre producteur et consommateur. Elle peut offrir un urbanisme à taille humaine, une sociabilité qui redonne du sens à la proximité et à la parole échangée.


Refaire nation par les territoires


La centralisation française a longtemps assuré la cohésion du pays. Mais aujourd’hui, elle tend souvent à produire l’effet inverse : elle isole, elle éloigne, elle décourage... et souvent elle est vue comme un accélérateur de l'uniformisation mondialisée des modèles de société importés du monde anglo-saxon.


Les décisions venues “d’en haut” paraissent abstraites, déconnectées du réel. Le citoyen n’y reconnaît plus son quotidien, ni son accent, ni son rythme de vie. Et si, pour sauver la nation, il fallait la décentrer ?


La France n’a pas besoin d’un récit uniforme, surtout si celui-ci n'est plus le notre, mais d’une mosaïque d’appartenances locales réconciliées. Recomposer l’unité nationale à partir des territoires, c’est reconnaître que l’identité française n’est pas une abstraction, mais une addition de fidélités locales, d’histoires régionales, de manières de vivre.


L’Occitanie pourrait être le laboratoire de cette refondation : non pas un modèle contre la France, mais une manière d’en redevenir le cœur vivant.


Une fierté tranquille, non une revendication


Cette renaissance culturelle n’a rien de nationaliste. Elle n’exclut personne, ne se construit pas contre autrui. Au contraire, elle repose sur une fierté tranquille, ouverte, hospitalière.


Elle dit qu’il est possible d’aimer son pays sans mépriser celui des autres, de défendre une culture sans en faire une arme, de s’enraciner sans se fermer.“Òme sens país, es òme sens nom”, dit un proverbe occitan : un homme sans pays est un homme sans nom.


Loin d’un slogan identitaire, cette phrase sonne comme un rappel à l’essentiel : pour se reconnaître dans une communauté politique, il faut d’abord se reconnaître dans un lieu, un paysage, une mémoire.


Le Sud comme boussole — et l’Europe comme horizon


Peut-être est-ce là, dans la douceur méridionale, que la France trouvera sa boussole et ses racines culturelles latines et méditerranéennes.


Le Sud n’est pas seulement une carte postale : il est une manière d’habiter le monde, une philosophie du temps, du partage, de la beauté simple. Dans un siècle de déracinement et de crispation, l’Occitanie peut redevenir un modèle d’équilibre, une école de mesure et de convivialité.


Mais cette dynamique ne s’arrête pas aux frontières françaises. Elle peut inspirer d’autres régions, d’autres provinces, d’autres cultures locales, qui, du Pays basque à la Bretagne, de la Savoie à la Corse, cherchent elles aussi à conjuguer héritage et modernité. Et au-delà de nos frontières, elle peut nourrir une conscience européenne latine, ce grand espace de romanité qui unit la France du Sud, l’Espagne, l’Italie et le Portugal dans une même tradition de lumière, de langue et de civilisation. Dans cette Europe du Midi, l’Occitanie ne serait plus une périphérie, mais une pièce maîtresse, un trait d’union entre les peuples latins et le reste du continent. Une région-pont, enracinée et ouverte, capable de rappeler que l’identité, quand elle est généreuse, peut encore unir.



Repères


Langue : L’occitan est parlé sous diverses formes (provençal, languedocien, gascon, limousin…) sur près d’un tiers du territoire français.


Histoire : Langue de culture et de poésie au Moyen Âge, elle a décliné avec la centralisation monarchique, puis républicaine. Aujourd’hui : Environ 500 000 locuteurs actifs, des écoles bilingues (Calandretas), une région administrative qui porte son nom mais sur un espace bien plus réduit

, mais un combat encore fragile pour la reconnaissance culturelle.


Enjeu : Faire de cette identité, non un folklore, mais un socle de cohésion sociale et de modernité territoriale — en France, et plus largement dans l’Europe latine.

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